L’après-midi moite du 1988 aux Bars en Trans était visiblement attendue. Je savais déjà que l’équipe avait reçu des messages de remerciements quant à cette programmation allant de Zed Yun Pavarotti à Jok’Air. Public jeune, très jeune si on en croit les bracelets blancs que portent les personnes majeures de l’assemblée, signe qu’elles accèdent à l’alcool aujourd’hui.
Mais le public hip hop a ça de commun qu’il met vraiment le bazar, bien plus que les autres. Il est 16h quand j’arrive et Youv Dee joue en bas, mais visiblement dans la salle il est plutôt 2h du matin avec un public sous caféine augmentée. Je reste bloqué devant cette masse qui ressemble à du feu, par ailleurs Youv Dee me dira entre ses locks roses après son concert qu’à Rennes c’est toujours comme ça, c’est toujours le bordel.
Mais je confesse être venu pour deux personnes aujourd’hui, même si Mou ne me déplaira pas avec sa gueule d’ange et ses bons morceaux. Je suis venu dans le club pour Jok’Air et pour Zed Yun Pavarotti. L’un à la fin, l’autre vers le début.
Zed Yun Pavarotti (dit « Le Yun » si j’en crois le gazier qui me gueule dans les oreilles pendant tout le concert) pue le vécu. Son rap de Saint Etienne tape très fort et me rappelle cette cuvée France 97 dans l’idée, cette aura des textes durs et difficiles à encaisser aux antipodes de l’ego-trip. La salle se remplit.
Mais alors que j’en rate le début, c’est le Big Daddy Jok qui casse l’étage du dessous. Jok’Air est arrivé en avance mais le public était là bien en avance aussi, les planètes s’accordent. Jok’Air a sorti son premier véritable album en mai dernier et j’ai beaucoup d’affection pour lui. J’ai beaucoup d’affection pour un battant comme lui qui ramène sa mère pour danser dans ses clips plutôt que d’insulter celle des autres, qui place une référence discrète à Lunatic en plein tube et qui fait plaisir à tout le monde. On va pas s’étaler des heures, on en a déjà fait cinquante deux.
Je me souviens de quelqu’un au 88 qui me demande si Jok’Air est une star (parce qu’il faut le voir de ses yeux, c’est vraiment l’Enfer ici, la température explose à mesure que les gens se montent quasi dessus pour ne rien rater) et moi de répondre que pas encore, ou alors pas vraiment, pas pour tout le monde mais qu’on croit en lui. J’espère que le message est passé Jok’Rambo, nous aussi on est armés jusqu’aux dents et on compte bien que tu vas pas partir comme ça.