Mais en fait le Mondo Bizarro c’est le bout du Monde !
Cela faisait des années que j’entendais parler de ce lieu mythique rempli d’énergumènes bigarrés et de musique énervée ; le seul et l’unique Mondo Bizarro. Seulement, ce lieu tient du graal tant il est retiré. Atteindre cet endroit tient de l’exploit, il vous faudra de la ténacité, une bonne dose de veine et surtout une conviction sans faille. Mais comme je suis magnanime je vais vous délivrer toutes les clefs nécessaires pour rejoindre le niveau 264 de la rue de l’Avenue du Général Patton, je vous assure que ça existe.
C’est donc repue d’un menu exclusivement constitué d’abats mitonné par le taulier le plus prolixe de la place Sainte-Anne, que je m’engage sur les chemins du Mondo Bizarro, toutes ces protéines m’ont remplie de courage. Ma quête éperdue me mènera sur une ligne droite infinie, juchée d’obstacles que j’ai plus ou moins évités avec succès. Premier conseil avisé : il est fortement recommandé de prendre le bus 5 qui mène directement au point de mire. Si vous ne trouvez pas le-dit bus, engagez vous sans peur dans la pénombre et le froid en suivant inlassablement la direction Mont Saint Michel. Tout au long de ce périlleux parcours vous croiserez : du matériel de chantier abandonné, un cinéma programmant les Jours heureux, des flâneurs nocturnes retournant vers la ville (enfin au point où on en est, la civilisation), le restaurant gastronomique Lecoq, des dizaines d’arrêts de bus déserts. Surtout ne craignez pas d’être suivi, car ça n’arrivera pas. Durant une interminable demi-heure vous cheminerez bille en tête jusqu’à un objectif qui devient de plus en plus flou car vous commencez à vous déshydrater, vous n’avez plus les idées claires, vous irez peut-être jusqu’à délirer, mais tel un Clint Eastwood dans Le Bon, la Brute et le Truand ; considéré comme définitivement perdu vous atteindrez votre destination. Fier comme un pape, se dressant parmi les tristes immeubles du bout de la ville, le Mondo Bizarro seul refuge couvert de l’étrange à Rennes, apparaîtra tel une oasis. Voilà comment on y arrive.
Une fois là-bas, la récompense est de taille : une cérémonie de têtes balancées d’avant en arrière à un concert très bruyant et rentre-dedans des Fumuj. Les gaillards se lancent sans distinction dans du rock ou du hip-hop, pour peu que ce soit pêchu. Tout le monde est content au Mondo Bizarro et crie sa joie, c’est bien normal ; seul les braves atteignent le stade ultime de satisfaction du but atteint.
Une fois le concert terminé, les oreilles quelque peu meurtries mais gonflées d’orgueil d’avoir réussi un exploit je repars dans le sens opposé et comme par enchantement tout devient plus aisé. De gentilles personnes me confectionnent un ticket de bus de métro avec les restes d’une carte de visite, en 4 arrêts de bus je rejoins sans heurts la Place Saint Anne ; c’était si simple au final. Demain je ferais mieux, je prendrai le bus.